La lutte continue sur la côte caribéenne du Nicaragua
Parmi les mauvaises nouvelles de cette année, il faut déplorer un massacre qui a touché en août 2021 les communautés autochtones Miskitu et Mayangna vivant sur la côte caraïbe du Nicaragua. Au moins 11 personnes y ont perdu la vie dans le cadre d’une escalade de violence et de dépossession infligée aux communautés autochtones par des colons (« colonos ») venus exploiter illégalement les forêts, les mines d’or et le bétail dans la région. Non seulement le gouvernement nicaraguayen n’a pas fait respecter les protections légales des terres autochtones, mais il joue en fait un rôle actif dans la colonisation et l’exploitation. Depuis 2015, les colons ont maintenant tué plus de 60 autochtones au Nicaragua, tandis que de nombreuses autres personnes ont été déplacées, selon le Centre pour la justice et les droits humains sur la côte atlantique du Nicaragua (CEJUDHCAN).
« Malgré la reconnaissance de ces terres comme territoires autonomes par la législation du pays, le gouvernement Ortega a fortement encouragé l’exploitation minière de l’or, la foresterie commerciale et l’élevage de bétail depuis son arrivée au pouvoir en 2007 – à la fois par ses actions et ses omissions », a déclaré Anuradha Mittal, directrice exécutive de l’Oakland Institute. « Le résultat a été un afflux de colons [connus localement sous le nom de colonos] sur ces terres, qui continuent de s’emparer des terres et de tuer les communautés autochtones en toute impunité », a ajouté Mme Mittal.
Le silence international autour de l’incapacité du gouvernement nicaraguayen à faire respecter les lois nationales, de sa collusion avec les intérêts commerciaux et de son rôle actif dans la colonisation des terres protégées a été brisé par le rapport de l’Oakland Institute intitulé Nicaragua’s Failed Revolution. Ce rapport a également mis en avant des témoignages de première main sur le fait que le gouvernement n’a pas donné suite aux rapports de violence et d’assassinats des membres de la communauté autochtone Miskitu depuis 2015. Le même cycle s’est poursuivi avec ce dernier massacre ; ni la police ni l’armée n’avaient enquêté sur l’affaire dans les jours qui ont immédiatement suivi les meurtres, ni reconnu que l’incident s’était produit.
« Les colons continuent de tuer notre peuple en toute impunité », a déclaré la lauréate du prix Paul K. Feyerabend, Lottie Cunningham, fondatrice et directrice du CEJUDHCAN. « L’État a ignoré nos demandes d’enquête et de poursuite des meurtres passés aux mains des colons, et maintenant les autorités refusent même de reconnaître que ce massacre a eu lieu. Cette impunité garantit que d’autres massacres comme celui-ci se produiront. »
L’année dernière, l’attention internationale portée au mépris du gouvernement nicaraguayen pour le bien-être des populations autochtones s’est accrue. Lors de la 46e session du Conseil des droits de l’homme des Nations unies, le haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme a exhorté le gouvernement nicaraguayen, dirigé par le président Daniel Ortega, à « prendre des mesures efficaces, en consultation avec les peuples autochtones, pour prévenir et combattre la violence croissante dont ils sont victimes, notamment en menant rapidement des enquêtes indépendantes sur les meurtres et les saisies de terres qui auraient été commis par des groupes armés ». Cette démarche a été suivie d’une audience publique organisée par la Commission interaméricaine des droits de l’homme sur les impacts de la colonisation des terres autochtones de la côte caraïbe en mars 2021. Il est raisonnable de douter qu’Ortega – tout juste vainqueur d’une farce d’élections libres – entende cet appel.